
On en parlait il y a deux jours sans pour autant le nommer: le double standard, c’est ce qui est à l’oeuvre quand un même comportement n’est pas perçu de la même façon, en fonction des individus. Il y a deux jours, par exemple, nous avons discuté des pères à qui l’on ne reproche jamais leur absence à l’école, ou des mères mal vues au travail car elles ont plus de trois enfants. On a noté que l’inverse ne fonctionnait pas : une mère absente à l’école passera pour défaillante, un père de famille nombreuse au travail pour un super-héros.
On va faire un petit jeu, inspiré de cet épisode du podcast Kiffe ta race (que je vous recommande, cela va sans dire). Voici ci-dessous deux articles du même média (le Parisien), dates du même jour, le 19 mars, soit deux jours après l’annonce du confinement par le président français.
Coronavirus en Seine-Saint-Denis :
un nombre record d’amendes, police et justice durcissent le ton
(Nathalie Revenue, Le Parisien, 19 mars 2020)
Confinement à Paris: «Avec ce temps, c’est dur de ne pas sortir»
(Christine Henry et Elsa Ponchon, Le Parisien, 19 mars 2020)
Y a que moi que ça chiffonne ? Dans le premier, nous avons des délinquants, dans le second, des promeneurs, qui n’ont pas su résister à l’appel du soleil. Ils ont pourtant fait exactement la même chose, c’est à dire qu’ils sont sortis prendre l’air, durant une période pour le moins sensible.
Je pense que c’est important d’arriver à décrypter ces doubles standards : c’est de cette façon que nous irons vers une société plus juste et inclusive. Lors de la rentrée scolaire, les médias ont beaucoup parlé des mouvements du lundi 14 septembre dans les établissements scolaires français et belges. Les français ont même eu le droit à un sondage génial : « Qu’est-ce qu’une tenue correcte pour une fille au lycée ? ». Au moins, c’est clair, les garçons n’ont rien à voir là-dedans : et c’est une illustration parfaite du double standard !
Ce qui me chagrine également dans cette histoire c’est qu’on enlève complètement la capacité des jeunes filles à être elles aussi des sujets désirants : personne ne s’inquiète qu’elles soient déconcentrées en cours par les jambes nues de leurs camarades. Ce n’est pas flatteur pour les garçons non plus: on sous-entends qu’ils sont incapables de réfréner des pulsions, et que pour les protéger, autant limiter les tentations. C’est aussi très hétérocentré comme point de vue : les jeunes lesbiennes arrivent-elles à rester concentrées pendant la saison des cropped tops, tout le monde s’en fout.
Combien d’hommes torses nus l’été dans les rues, les parcs, à la plage, quand c’est absolument impossible pour une femme d’enlever son t-shirt dans l’espace public ? Il y a cinq ans, suite à une manifestation des Islandaises sur Twitter, le réseau social avait même préféré dé-référencer le pays et le hashtag… pour éviter le scandale !
Je dois vous prévenir : si vous n’aviez pas conscience des doubles standards avant la lecture de cet article et que vous les découvrez aujourd’hui vous risquez de ne plus voir votre quotidien de la même façon. Vous allez en voir partout, et vous aurez raison.
Les doubles standards nourrissent la discrimination, et par là, la violence et les inégalités. Il est donc impératif de s’en défaire.
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C’est fatiguant, d’être féministe. De façon générale, je ne suis pas contre le débat, pourvu qu’il soit un minimum constructif. Mais cette question « Non mais ça va vous avez le droit de vote, qu’est-ce qu’il vous faut de plus ? » me rends dingue.
Du 1er au 25 décembre, voici votre calendrier féministe. Chaque jour, une réponse plus ou moins cinglante, pour égayer vos repas de famille et vos apéros Zoom : et si grâce à moi, vous ne passez pas de meilleures fêtes de fin d’années, gardez bien en tête que ce qui ne fait pas partie de la solution, fait peut-être partie du problème.
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