La paix pour les personnes transgenres


Il n’y a pas si longtemps, on a parlé ensemble des intersections pour éviter les angles morts dans nos réflexions militantes et politiques : vous vous souvenez ?

La question des personnes trans fait partie de ces angles morts  : il y a quelques années, je ne m’y intéressais pas car je ne me sentais pas concernée. Aujourd’hui, je trouve au contraire que ce sujet est essentiel : pour les personnes trans et le reste du monde. La prise en compte des intersections enrichit le débat public.

Comment imaginer un monde en paix dans lequel on force des personnes (probablement 1 à 3 % de la population en Belgique) à se conformer à ce qui nous arrange, quitte à les pousser au suicide (toujours en Belgique, 38 % des répondant.e.s à cette étude ont eu des pensées suicidaires) ?

Petit apparté : peut-être que vous vous en foutez de la paix dans le monde, et là … houston, on a un problème. Le féminisme, comme toutes les luttes, a l’objectif de changer le monde, d’en faire un meilleur endroit pour tous-tes. Et c’est quelque chose que j’ai remarqué dans nombre de mes débats d’opinion (si vous aussi vous êtes constamment la féministe de service on peut se serrer la main et surtout se serrer les coudes) : au final, les principaux détracteurs n’ont tout simplement pas envie que les choses s’améliorent. Le monde leur convient comme il est.

Petit conseil de survie : prenez soin de vous et lâchez l’affaire.

Partez en courant et jetez-vous de toutes vos forces dans votre bain. Optimisez votre énergie en choisissant de discuter avec celles & ceux qui ont envie de changer le monde comme vous, et qui prendront le temps de parcourir vos références et de se documenter, d’arriver avec des idées nouvelles et des bonnes intentions. On a pas besoin des autres, la lutte se fera avec ou sans eux / elles.

Au sujet de la détresse dans laquelle sont plongé.es un grand nombre de personnes trans cet article résume bien la question : « Des études menées en France, en Europe et aux Etats-Unis mettent en évidence des chiffres alarmants : tandis que le risque de passage à l’acte est 2 à 5 fois plus élevé chez les jeunes LGB (…), les personnes trans* ont jusqu’à 10 fois plus de risque de passer à l’acte (…). Qui plus est, 69% des jeunes trans* auraient déjà pensé au suicide. »

Si vous avez l’impression que je fais beaucoup de bruit pour rien, écoutez la parole et la souffrance des personnes concernées. C’est très difficile de vivre dans le « mauvais corps » : je vous renvoie à cet épisode d’Un podcast à soi et plus récemment, à ce documentaire magnifique. J’ai pleuré tout du long : la souffrance de cette petite fille qui veut simplement porter une robe à l’école et être dans le groupe des filles à son cours de danse m’a brisé le coeur. Parce que c’est ça, être une personne transgenre : leurs demandes ne sont pas compliquées, c’est notre société qui les change en lutte.

Il me semble impossible de ne pas évoquer une dernière chose, et après je vous laisse vaquer à vos occupations : ce sujet des personnes trans divise (à tort) la communauté complexe du féminisme. Il existe des féministes hostiles, qui considèrent que les personnes trans détournent l’attention ou sont des sortes d’agents infiltrés du patriarcat (c’est très bien expliqué dans un épisode du podcast Camille, que vous pouvez écouter ici). Et c’est terrible car tout est déjà si difficile et j’aimerais pouvoir dire « essayons de nous unir sur certains sujets pour tout de même avancer », mais je n’en suis pas très sûre : ça me semble hypocrite, au sein d’un mouvement qui souhaite rendre la liberté de chacun.e à disposer de son propre corps.

Pour finir : s’il vous plait, ne parlez plus de transexuel-le-s : ce terme est médical et date d’une période trop récente où l’on assimilait les personnes transgenres à des personnes psychiatriquement déviantes : jusqu’en 2007, en France, on stérilisait les personnes trans ! Est-ce que vous réalisez ?

Encore une fois, les mots sont lourds de sens : comme le dit si bien Lexie dans cet épisode du podcast Camille « Comment être un·e bon·ne allié·e des personnes trans » (que je vous recommande si vous avez des questions, car elles prennent le temps de répondre à tout ce que vous vous demandez) : au début de la pandémie du Covid19, on s’est tous-tes habitué.e.s à un nouveau vocabulaire (vous disiez souvent que vous aviez une réunion en présentiel, avant?), donc le mot transgenre devrait rentrer assez facilement dans le lexique de tous-tes.

C’est tout pour moi, demain on va parler de Bernard Pivot et Greta Thunberg !

C’est fatiguant, d’être féministe. De façon générale, je ne suis pas contre le débat, pourvu qu’il soit un minimum constructif. Mais cette question « Non mais ça va vous avez le droit de vote, qu’est-ce qu’il vous faut de plus ? me rends dingue.

Du 1er au 25 décembre, voici votre calendrier féministe. Chaque jour, une réponse plus ou moins cinglante, pour égayer vos repas de famille et vos apéros Zoom : et si grâce à moi, vous ne passez pas de meilleures fêtes de fin d’années, gardez bien en tête que ce qui ne fait pas partie de la solution, fait peut-être partie du problème.

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